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En débat

Bivalence, recrutements, prérecrutements…. des clarifications s’imposent !

Marianne Auxenfans

mardi 1er novembre 2011

Quadrature du cercle

Un article est sorti le 13 octobre sur Mediapart : http://blogs.mediapart.fr/blog/sebastien-rome/131011/est-ce-que-francois-hollande-pourra-creer-reellement-12-000-postes-d

Il pointe avec raison le fait qu’en cas de victoire, un futur gouvernement de gauche aura à trouver, en un temps très limité, des solutions pour assurer la rentrée scolaire 2012 sur d’autres bases que les suppressions de postes organisées par la droite - et que ça va être très compliqué.

C’est intéressant que ce problème "sorte", et cela doit encourager les syndicats de la FSU à formuler rapidement des propositions sur les solutions transitoires qui leur paraissent adéquates par rapport à la gravité de la situation dans leur secteur, tout en étant acceptables et compatibles avec leurs revendications à plus long terme.

Un document interne du PS

Cet article de Mediapart publie en annexe une note écrite le 23 juin 2011 par Jean Louis Auduc, fin connaisseur des pbs de formation des enseignants (il fut directeur de l’IUFM de Créteil jusqu’en juin dernier).

Intitulée "Pistes pour une reconstruction de la formation des enseignants : une série de défis" , cette note conseillait le PS sur les mesures et décisions à prendre, précisément dans les quelques semaines entre victoire présidentielle et rentrée scolaire 2012.

http://www.mediapart.fr/files/Sébastien%20Rome/Note_Formation_des_Maitres.pdf

On y retrouve des analyses et des propositions déjà bien connues, par exemple : rejet du "schéma du secondaire : 1h, 1 classe, 1 prof " ; démarche axée sur l’acquisition de compétences, et prenant en compte "les différentes formes d’intelligences" ; un objectif essentiel de la formation initiale est de faire acquérir aux profs la capacité de "s’adapter au local" ; concours de recrutement en M1 avec un M2 via l’apprentissage, le concours étant commun et le M2 permettant de former spécifiquement des PE, des profs de collège et des profs de lycée ; valoriser les compétences de certains profs par des certifications ouvrant l’accès à des postes profilés, comme "responsable de niveau" ou adjoint de chef d’établissement, etc.

C’est bien le droit de l’auteur de défendre de telles propositions, mais si elles étaient mises en oeuvre, ça ne pourrait satisfaire le SNES parce qu’on retrouverait alors avec Hollande des tas de choses que nous combattons sous Sarkozy - or ce n’est pas cela qu’on attend !

La bivalence en collège préconisée dans les mesures d’urgence 

Plus grave : parmi les mesures préconisées dans cette note, on trouve - sans aucune argumentation d’ailleurs - la bivalence en collège, qu’il faudrait instaurer via le concours 2013 si possible, au plus tard via le concours 2014 (cf page 11 et page 12).

La bivalence étant comme chacun sait rejetée non seulement par le SNES, premier syndicat dans le 2d degré, mais par la profession en général, prôner l’introduction de la bivalence c’est clairement proposer d’aller au clash avec le SNES et la profession. (sans commentaire….) Et proposer de l’introduire en vitesse en mai-juin 2012, entre bac et vacances, ça ne colle pas très bien avec l’annonce par le PS d’une loi-cadre préparée par des négociations avec les syndicats avant les élections….

La bivalence en collège : dans le tiroir ou au panier ? Bien entendu, ce n’est pas parce qu’une personnalité comme Jean Louis Auduc a préconisé en juin la mise en place de la bivalence que le PS retient maintenant cet objectif, ou que son candidat l’adoptera et le mettra en œuvre au printemps.... 

Lors du Colloque FSU du 28 septembre, le représentant du Parti Socialiste, Bruno Julliard, n’a d’ailleurs pas du tout parlé de la bivalence en collège, centrant ses interventions sur le fait que, compte tenu de la crise et des déficits publics, un gouvernement à direction socialiste opèrerait des choix, et que ces choix consisteraient à faire du 1er degré une priorité. 

Sur la bivalence,personne (ni le PS, ni Hollande) ne nous a encore rien annoncé - donc nul ne sait à ce jour quel sort ils réservent à la préconisation d’Auduc.... Un petit éclaircissement ne serait pas du luxe.

Le 2d degré, variable d’ajustement annoncée ?

Si le 2d degré doit, comme Julliard l’a laissé entendre au colloque FSU, faire les frais de la réduction des déficits et de la soumission aux contraintes budgétaires, il y a du souci à se faire.

Il se trouve que le 2d degré est confronté à une poussée démographique élèves, à une vague de départs en retraite chez les certifiés et agrégés, et à une crise de recrutement aux concours.

Envisagée dans ce contexte (pénurie de profs) et avec ces prémisses (choix de prioriser d’autres secteurs "parce qu’on ne peut pas tout faire"), la redéfinition annoncée du service des personnels du 2d degré ne peut que se traduire par un alourdissement - ça, avec les annonces de Julliard lors du colloque FSU du 28 septembre dernier, c’est déjà clair !

Que ce ne soit pas bon pour les personnels, cela va sans dire – même si c’est mieux de le dire. Mais les premières victimes de telles orientations politiques seront les élèves qui ont le tort de se trouver en collège ou en lycée, ou qui viendront à y passer – ce qui fait du monde.  Le corollaire, c’est que le SNES n’est pas forcément isolé dans ce nécessaire débat préélectoral : parents et lycéens aussi peuvent peser pour que le 2d degré ne soit pas sacrifié aux dogmes budgétaires et aux agences de notation.

60 000 quoi ? et comment ?

Rien d’étonnant à ce que l’on constate, en début de campagne, certains flottements entre « rétablir 60 000 postes sur le quinquennat » (Hollande), « recruter 60 000 profs ça coûtera 2,5 milliards » (Julliard lors du colloque FSU et à nouveau lors du colloque du CRAP des 24-25 octobre, http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2011/10/26102011_AssisesPedagogiques.aspx ), et "nous embaucherons 60 000 professeurs, éducateurs et professionnels de l’enseignement dans le cadre d’un plan pluriannuel sur 5 ans" (Hollande : http://www.vousnousils.fr/2011/10/22/hollande-reaffirme-sa-priorite-a-la-jeunesse-515337 )

60 000, même si c’est 60 000 profs, ça ne fait pas le compte (en particulier dans le 2d degré, vu les départs en retraite et la poussée démographique). Si c’est 60 000 dont une proportion certaine de personnels de statut dérogatoire, ça va encore moins….

Prérecrutements ou pas ?

Et surtout, comment faire en sorte qu’il y ait des étudiants candidats assez nombreux pour que les postes d’enseignants affichés soient effectivement pourvus ? D’après le compte rendu des annonces de Julliard aux Assises CRAP les 24 et 25 octobre, http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2011/10/26102011_AssisesPedagogiques.aspx

"il n’y aura pas de formation initiale rémunérée des enseignants" , "mais un prérecrutement sur critères sociaux", autrement dit des bourses ou des allocations.

Prenons l’exemple des maths 

Au CAPES 2011, il y avait 950 postes pour +/- 1 900 départs en retraite (RGPP : remplacer 1 départ sur 2), seulement 1 319 présents à l’écrit, le jury n’a pourvu que 574 postes. Pour remplacer chaque départ en retraite, il faut doubler les postes aux CAPES (= 1 900 postes), mais on ne les pourvoira pas si on n’a toujours que 1 319 candidats présents. Même avec deux fois plus de candidats présents (2 638), le ratio restera tel que le jury ne pourvoira pas forcément tous les postes : pour être tranquille, il faudrait +/- tripler le nombre de candidats présents (3 957).

Si on veut non seulement remplacer 100% des départs en retraite de l’année, mais commencer à rattraper le déficit de recrutement accumulé sous Sarkozy, il faut recruter davantage. Et si on veut faire face à la poussée démographique élèves dans le 2d degré, il faut encore recruter davantage. Pour alléger les effectifs/classe ou rétablir des dédoublements, idem. Donc l’objectif-cible, pour les maths, se situe aux alentours de 5 000 candidats effectivement présents aux écrits, et bien préparés, et cela pendant toute la durée du plan pluriannuel de recrutement.

Est-ce qu’on pense sérieusement qu’on arrivera à passer de 1300 candidats présents en 2011, à +/- 5000 candidats présents en 2013, 2014, 2015, 2016, rien qu’en distribuant des bourses aux seuls étudiants de maths socialement défavorisés ?

Peu attractives (car ne comptant ni pour la retraite ni pour la carrière), inefficaces pour planifier les recrutements (car n’impliquant pas d’engagement décenna l à exercer comme enseignant), ces bourses, réservées par définition à une minorité d’étudiants (les plus défavorisés) ne seront pas non plus de nature à rétablir et renforcer une solide formation initiale au métier d’enseignant dont tous les étudiants ont besoin et que nous revendiquons.

Ce n’est pas par hasard que SNES, SNEP, SNUEP, SNESup, SNUIPP sont tous d’avis qu’il faut recourir à des prérecrutements pour restaurer des viviers correspondant au plan pluriannuel de recrutement, et ménager pour la masse des futurs profs le temps indispensable à une formation des enseignants enrichie.

Or si la crise de recrutement n’est pas surmontée par des mesures efficaces, le seul expédient consistera, au nom de la pénurie de profs, à faire passer le temps de service des certifiés de 18 à 25h de cours/ semaine…

Marianne Auxenfans

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