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La réforme du collège : l’arbre qui montre la forêt !

UA SNES Aix-Marseille

jeudi 1er octobre 2015

La stratégie syndicale mise en oeuvre par le SNES dans la première moitié du quinquennat, consistant à sérier les questions pour engranger ce qui pouvait l’être, avait sa pertinence face à un ministère qui disposait d’une marge de manoeuvre au sein du gouvernement (recrutements, éducation prioritaire, socle et programmes, groupes métiers, ...). Depuis l’arrivée de Najat Vallaud-Belkacem, et la reprise en main des questions d’éducation par Matignon, la politique éducative est sans conteste la déclinaison des logiques à l’oeuvre sur les autres ministères (management local, recherche d’économies, flexibilité). Nous devons en conséquence modifier notre stratégie et mettre en évidence les cohérences, passer d’une lutte en défense sur le collège à une lutte offensive pour la priorité à l’éducation.

Dialogue imaginaire trouvé sur Twitter : @prifetprof : "- A cette allure @najatvb , vous allez bientôt supprimer les profs !
- Non ...
- Ouf !
- ... Non, parce que ça, c’est @EmmanuelMacron qui s’en occupe."

Au-delà du bon mot, cela dit bien ce qui se joue avec la réforme du Collège.

Réforme du collège : flexibiliser les enseignements

On le sait, Collège2016 agrège les mécontentements car cette réforme détruit des dispositifs appréciés des familles, bouleverse les pratiques professionnelles, percute l’identité professionnelle des professeurs de second degré, démonétise une part importante des enseignements. Mais on ne soulignera jamais assez que c’est d’abord une réforme de la "gouvernance" des établissements qui accroît les prérogatives des équipes de direction et renvoie au local les arbitrages de gestion des moyens, des heures et des postes. Collège2016 consiste à flexibiliser les structures. A l’instar de la réforme Chatel du lycée, elle permet de moduler les enseignements non pas en fonction de considérations pédagogiques, mais pour optimiser l’utilisation des postes. Peu importe que ce faisant la continuité du service public et l’égal accès à l’éducation soit malmenés. C’est la raison pour laquelle le SNPDEN UNSA soutient Collège2016, comme il a soutenu la réforme Chatel du lycée. C’est la raison pour laquelle Collège2016 est également défendue par Luc Chatel, Alain Madelin ou Alain Juppé.

Après le collège, deuxième lame pour les lycées ?

Le récent brûlot de la Cour des Comptes sur le lycée, trop cher, mal gouverné, inefficace, doit nous alerter : nous sommes entrés dans une phase de réformes successives visant la réduction des coûts du second degré. Le rapport de la Cour des Comptes, mais aussi la réponse que lui a faite le Ministère de l’Education Nationale ("la question de réduire les enseignements au lycée mérite d’être posée"), montre que les lycées sont à nouveau en ligne de mire. On savait que la réforme Chatel n’avait pas atteint ses pseudo-objectifs pédagogiques, on sait maintenant qu’elle n’a pas non plus atteint ses objectifs comptables et que certains entendent y revenir. Peu importe que les indicateurs de réussite scolaire atteignent des records historiques !

Redéployer ou faire baisser la dépense publique ?

Faire baisser le coût du second degré est un objectif partagé par les partis de gouvernement, de droite comme de gauche, et ce alors que l’accès aux qualifications reste un défi majeur pour une économie développée. Il serait regrettable que nos camarades du premier degré prennent pour argent comptant les promesses de redéploiement des lycées vers l’école, promesses faites par exemple par Alain Juppé : toute l’histoire le démontre, quand un gouvernement décide de ne pas investir dans l’éducation, tous les niveaux d’enseignement sont perdants. Laisser miroiter un effort supplémentaire sur le premier degré permet de diviser pour mieux régner, et d’avancer sans difficulté sur le chantier principal : la réduction généralisée des coûts et la baisse de la dépense publique.

Et la démocratisation dans tout ça ?

En outre, réduire le coût du lycée français, cela signifie poursuivre le travail de sape entrepris sous Darcos/Chatel contre le lycée professionnel et le lycée technologique. L’écart de coût entre les lycées de pays comparables pointé par la Cour des Comptes s’explique en grande partie par l’existence de ces voies, qui sont des particularités françaises. Derrière le discours comptable, la question qui est posée est celle du devenir de voies d’accès aux qualifications qui sont d’abord utiles aux milieux populaires et aux petites classes moyennes : restructurer le système éducatif, autour d’une école du socle pour tous et d’un Bac-3/Bac +3 destiné à fournir 50 à 60 % de diplômés dans une classe d’âge, laisse implicitement près d’un élève sur deux sans poursuite d’étude à la fin du collège ! Le prochain congrès de la FSU pourrait-il se doter d’un mandat autre que 100 % d’une classe d’âge au Bac + 3 ?

Une réforme de l’éducation, ou une réforme de l’Etat ?

La réforme Collège2016 s’inscrit dans la lignée de la réforme Chatel du Lycée, de la loi LRU , en ce sens qu’elle accroît l’autonomie budgétaire des établissements publics locaux. Nicolas Sarkozy propose aujourd’hui d’accroître de même l’autonomie des hôpitaux. L’argument séducteur de l’adaptation au local masque mal le renoncement à l’égalité d’accès à des services publics de qualité pour tous. La réforme Collège 2016 implique en outre une baisse des DGH, de nouvelles suppressions de postes, du fait de la disparition des dédoublements. On comprend que rien ne soit fait, alors, pour juguler la crise de recrutement qui fait perdre entre 10 et 20 % des postes offerts aux concours de recrutement. Sur le terrain, le recours aux contractuels ne se dément pas. Toutes les pièces du puzzle sont en place pour une généralisation du recours à l’emploi contractuel sous-qualifié dans l’éducation. Au début du quinquennat de François Hollande, le gouvernement cherchait à accréditer l’idée que l’éducation nationale était sanctuarisée. La place centrale que l’éducation occupe dans la précampagne électorale et dans l’ébauche des programmes des futurs candidats nous prouve que les libéraux affirment aujourd’hui la nécessité de réformer l’éducation nationale, premier budget de l’Etat, ministère employant le plus de fonctionnaire.

La bataille autour de la réforme du collège n’est pas la seule affaire des professeurs qui sont actuellement en poste au collège. Elle concerne tous les enseignants, les parents, les citoyens attachés au modèle social français que certaines prétendent vouloir "refonder". C’est dans cette optique que doivent être construite la manifestation nationale du samedi 10 octobre, et ses suites. Le fait que Manuel Valls se sente politiquement obligé de respecter les engagements de revalorisation des carrières des fonctionnaires et de négociation sur la valeur du point d’indice en février 2016, malgré la défection de CGT, FO et Solidaires, montre qu’il y a des contradictions politiques et des enjeux électoraux sur lesquels nous pouvons agir pour contrecarrer les projets rappelés ci-dessus.

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