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En débat

Non à la réforme "ambition - déréglementation"

vendredi 24 mars 2006

La réforme de l’éducation prioritaire que met en place De Robien n’a que peu de rapport avec l’ambition de la réussite de nos élèves... Par contre, par son idéologie et ses mesures, elle représente la quintessence de la pensée libérale :

- réduction des dépenses de l’Etat : tout est financé par redéploiement

- mise en place d’une école à deux vitesses, avec une école au rabais pour les enfants des milieux populaires

- déréglementation tous azimuts, notamment des statuts des enseignants

- démantèlement du service public national d’éducation et mise en concurrence des établissements.

On aurait donc grand tort de penser que cette réforme ne concerne que les établissements classés ; elle va encore plus loin que la loi Fillon, qu’elle complète et systématise, dans le renoncement à la démocratisation de notre système éducatif et nul doute que ces mesures s’étendront rapidement à l’ensemble du système éducatif.

Toute cette réforme est inspirée par les valeurs libérales, introduites de façon pernicieuse sous couvert de pragmatisme, de bon sens...et de rejet de toute idéologie ! Les tartuffes qui nous gouvernent n’hésitent pas à reprendre les mots d’ordre avancés depuis des décennies par les partisans de la démocratisation de l’école : « réussite de tous », « égalité des chances » pour mieux les subvertir et masquer derrière leurs vrais objectifs : « individualisation », « contractualisation », « mise en concurrence », « autonomie », « respect des talents et des rythmes de chacun », nouvel avatar de l’archaïque idéologie des dons.

Ce credo libéral se concrétise pour l’essentiel par une déréglementation qui affecte aussi bien les élèves que les personnels, dont les conséquences seraient désastreuses pour tous.

La logique d’individualisation conduirait à ne plus reconnaître que deux catégories d’élèves :

- les plus en difficulté qui relèveraient du PPRE limité à la maîtrise du langage et du calcul, voire des dispositifs extérieurs à l’école du PRE de la loi Borloo, avec la perspective d’une éviction précoce du collège dès 14 ans vers l’ « apprentissage junior ».

- Les élèves méritants qui recevraient des bourses au mérite et pourraient avec une mention TB au brevet, « échapper » à leur lycée de secteur ainsi privé des meilleurs élèves, ce qui renforcerait leur « ghettoïsation ».

La masse des élèves ne bénéficieraient pas de moyens supplémentaires et seraient cantonnés au socle commun dont l’acquisition est l’objectif affiché des collèges « ambition réussite » comme l’atteste le « livret de compétences » dont sera muni chaque élève.

De plus, dans ces collèges, le CA aurait plus d’autonomie pour définir le projet pédagogique et adapter l’organisation de la journée, les programmes et les horaires. Les classes seraient remplacées par des groupes de compétences dans toutes les disciplines, ce qui permettrait de regrouper les « bons » d’un côté, les « mauvais » de l’autre. La « découverte professionnelle » serait avancée en 4ème, ce qui en dit long sur les véritables objectifs de cette « ambition réussite »,et comme il n’y aurait plus de ces redoublements qui coûtent si cher à l’Etat, les enfants de milieux populaires pourraient aller exprimer « leurs talents » en apprentissage ou dans des voies professionnelles courtes.

Pour ce qui concerne les enseignants, la mesure la plus emblématique est la création de ces « professeurs- référents » recrutés sur des postes à profil qu’on demande actuellement aux professeurs de ces collèges et aux directeurs des écoles du réseau de définir ! Affectés dans le cadre d’un mouvement spécifique, sans aucun barême, après entretien avec le principal du collège , ces « super-profs » signeraient un contrat individuel, qui pourrait être rompu à tout moment en cas de non respect de sa lettre de mission. Enfin, ces professeurs pourraient être issus du 1er ou du 2nd degré et avoir des services partagés entre les deux degrés. En plus de quelques heures d’enseignement, ils auraient un grand nombre de tâches de coordination, de formation, de partenariat... à assumer qui en feraient un échelon hiérarchique intermédiaire entre le principal et les autres professeurs. Quand on sait que le conseil pédagogique institué par Fillon doit multiplier les responsables au sein du collége, on peut craindre une véritable « caporalisation » du métier et la mise à mal du climat de solidarité entre pairs qui faisait la force de ces établissements difficiles. Belle ambiance délétère en perspective d’autant que ces responsabilités favoriseraient les carrières, les mutations de ces « heureux élus » ! La formation au « management » prévue par la réforme pour les « cadres » de ces établissements pourrait largement s’inspirer des méthodes patronales de gestion des ressources humaines qui ont su si bien faire éclater les solidarités dans les entreprises. L’autonomie des établissements serait surtout celle du principal qui dirigerait le « comité exécutif » du réseau où devraient siéger les directeurs des écoles (en contradiction avec leur statut) recruterait ,signerait les contrats avec ces super-profs mais aussi avec le rectorat pour les projets d’établissement et les moyens attribués conditionnés par des résultats, régulièrement évalués. Enfin cette réforme est l’occasion de redonner vie à ces vieux projets de bivalence et de primarisation du collèges. Les professeurs de lycées professionnels (PLP),bivalents pourraient enseigner en collège et les professeurs des écoles seraient amenés à y exercer une partie de leur service pour enseigner les apprentissages fondamentaux. Cette volonté d’ouvrir le collège à la bi ou polyvalence, mise en rapport avec la focalisation sur le socle commun et les apprentissages fondamentaux, ne laisse pas d’inquiéter sur les objectifs que le ministre assigne au collège

Comme on le voit cette réforme n’a que peu à voir avec la lutte contre la difficulté scolaire mais beaucoup avec la déréglementation tant pour les élèves que pour leurs enseignants. Elle est même à l’opposé de la nécessaire refondation de l’éducation prioritaire qui,selon nous, exigera qu’on améliore simultanément les conditions de travail des personnels et des élèves, pour avancer dans la voie de la démocratisation du système éducatif.

Le conditionnel a été systématiquement employé car nous voulons croire que la lutte permettra de repousser ce dangereux projet.

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