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En débat

SUR LA FSU

Matthieu Leiritz

samedi 5 novembre 2011

La préparation du Congrès de Reims sera l’occasion de poursuivre l’analyse sur l’état de la FSU, son fonctionnement et son évolution possible, au regard des mandats que nous nous sommes donnés à Perpignan

A cet égard, le bilan apparaît mitigé. Au delà des conditions que le Snes a acceptées pour sa réalisation, le renforcement du secrétariat national est appréciable. La FSU a pesé dans les luttes, mais aussi dans les négociations, et a joué un rôle certain dans le maintien d’une unité interprofessionnelle. Pour autant, la FSU ne parvient pas à surmonter une crise structurelle déjà ancienne, et qui ne saurait plus, 20 ans après la fondation, être assimilée à une crise de croissance. D’autant que de croissance il n’y a plus, les espoirs liés à l’élargissement de la fédération aux autres champs de la Fonction publique ayant montré leurs limites. Certes la FSU, comme toutes organisations pleinement vivantes et donc traversées de contradictions, a connu bien des crises ouvertes depuis sa naissance, qu’il s’agisse du départ du Snetaa, ou de la question de l’élargissement. Elles étaient vite surmontées, sinon oubliées, dans une dynamique de construction de la place de la FSU dans le paysage syndical, de luttes collectives, même perdues comme sur les retraites en 2003, de progrès dans la représentativité effective de la FSU et de ses syndicats nationaux.

Force aujourd’hui est de constater que les moments de crise ouverte se multiplient, résolues non par des efforts préalables de synthèse, mais par une tactique « au bord du gouffre » (ratification des accords de Bercy), ou de blocage (non ratification des accords sur la précarité).

Les ingrédients du malaise, ou plutôt d’une crise qui de latente est devenue permanente quoique en général de basse intensité, sont bien connus. UA, courant majoritaire qui devrait constituer l’épine dorsale de la fédération, tend à devenir un lieu d’échanges plus ou moins aimables entre les directions des syndicats nationaux, certes utile car espace de négociations et de recherche de compromis. Mais UA n’est pas, ou plus suffisamment, un lieu de réflexion stratégique fédérale, ou de production d’analyses communes qui structureraient le débat dans la fédération et dans les SN, et constitueraient un cap à tenir solidairement, face aux minoritaires qui, en proie à la concurrence, eux savent surmonter leur extrême diversité par une commune opposition : je bloque donc je suis. Les courants n’ont jamais, n’en déplaise aux esprits rapides, reflété purement et simplement les appartenances politiques des camarades s’en revendiquant. L’histoire fait qu’aujourd’hui UA regroupe l’ensemble des sensibilités qui naguères auraient peuplé UA, UID, Autrement,.. voire EE. Outil pratique, UA n’irrigue plus la pensée fédérale. Qu’il en aille sans doute de même dans les autres courants de pensée ne constitue guère une consolation. Dès lors la question peut se poser : cette composante constitutive de la fédération est elle toujours nécessaire ? Après tout, d’autres organisations non moins démocratiques, et dont nous pouvons d’ailleurs être historiquement issus, ne fonctionnent pas ainsi. Le maintien, pour des groupes minoritaires, de possibilités d’expression est un impératif démocratique, mais ne saurait constituer une assurance – vie pour un type de structuration qui eut son utilité, mais aujourd’hui peut être inadapté, et dans lequel, chacun le sait, les nouveaux adhérents ne se reconnaissent plus, pour autant d’ailleurs qu’ils le connaissent.

La déliquescence du ciment UA explique largement la réactivation des clivages de toujours parmi les composantes de la FSU : syndicats Education et hors Education, premier et second degré, etc… Améliorer les règles qui président au décomptage des votes en instance n’est dès lors sans doute pas inutile, mais chacun en voit bien les limites de la portée à moyen terme, si les principaux syndicats, et d’abord de l’Education, ne retrouvent pas le chemin d’un dialogue confiant et fertile , car débouchant sur des analyses produites, portées et promues ensemble, résolument.

Enfin, quel est aujourd’hui le poids réel de la FSU dans le paysage syndical et politique français ? Si les années 90 et le début du siècle furent une période de « percée flamboyante » puis de consolidation de notre fédération venue, en trouble fête impatient, bousculer pesanteurs et inertie des organisations alors installées, force est de constater un certain essoufflement de son dynamisme, et de commencer à distinguer les limites de son efficacité, voire de son influence. Certes, elle demeure très présente, hégémonique sur le champs de l’Education, tant dans la rue que dans les urnes, quelles que soient les manœuvres du Pouvoir pour favoriser nos concurrents. Sans les efforts obstinés de la fédération et de ses syndicats, qui pourrait affirmer que les questions relatives à la place des services publics, et notamment de l’Ecole, aurait été à ce point au coeur des débats pré électoraux, même sous des formes partielles ou comptables ? Mais qui ne voit notre relative impuissance, face à une majorité conservatrice qui théorise la prééminence absolue du pouvoir de l’Etat face aux revendications des salariés et de leurs organisations ? Le mouvement de 2003 peut il être dépassé en ampleur, ou constitue t il une apogée ? Et dans ce dernier cas, jusqu’à quand les salariés feront il confiance, par le vote mais aussi par l’adhésion, à une organisation certes combattive mais qui peine à engranger les acquis, tant pour les salariés que pour l’Education ou la FP soumises à des coups redoublés ? L’impuissance ne constitue pas aujourd’hui l’apanage de la seule FSU, mais là encore doit on se contenter de se comparer pour mieux se consoler ?

Alors que la FSU travaille à surmonter ses problèmes de fonctionnement et à résoudre ses interrogations identitaires, les échéances nées des nouvelles règles de représentativité se rapprochent inexorablement. En 2013, les salariés auront dit quelles organisations seront amenées à négocier en leur nom des accords nationaux. La FSU gardera son rôle incontournable à l’Etat, mais risque la marginalisation au niveau des 3 FP, sans parler des discussions interprofessionnelles.

Le statu quo est donc volens nolens un choix impossible, sauf à se résoudre à un rôle d’appoint, ou pis, de supplétif. D’autant que la recomposition est en marche, chaotique, peu lisible dans ses lignes de force au niveau des secteurs professionnels, des branches et encore moins au niveau des entreprises, espace de « négociation » que la droite, en fidèle traductrice des vieilles revendications patronales, privilégierait demain en cas de victoire, sous couvert d’ « autonomie » des partenaires sociaux, refrain bien connu, y compris dans l’Education. Emiettement sectoriel, lisibilité encore amoindrie du paysage syndical, repositionnement préférentiel du dialogue social au niveau local, le tout accompagné de la formation d’un pôle syndical d’accompagnement d’autant moins difficile à constituer – CFDT/UNSA/CFTC/part non PT de FO - qu’entravé non par des motifs idéologiques –inexistants – mais uniquement bureaucratiques, épineux, mais surmontables dans une logique de survie.

Le Snes et la FSU ont affirmé leur volonté de ne pas se satisfaire de l’émiettement syndical, source d’impuissance donc de désespérance des salariés, alors tentés par la délégation revendicative au seul politique : l’Histoire récente nous en enseigne les risques et la vanité. Ils ont affirmé la nécessité de la construction, avec le souci permanent de la transparence et de l’association des syndiqués - avec la conscience que la dynamique ne peut venir toutefois d’une dynamique spontanée, réplique sécularisée de l’Immaculée conception - d’un rassemblement syndical qui n’exclue aucune organisation, et dont la CGT doit être partie prenante, sur la base de pratiques alliant négociation et mobilisation, d’objectifs de transformation sociale.

Un bilan doit en être fait, une nouvelle étape d’unification envisagée par le Snes et proposée à la FSU et à ses syndicats nationaux.

Cette nouvelle étape, le Snes et la FSU seront d’autant plus à même de l’accomplir que nos organisations se seront renforcées, tant dans leur fonctionnement, que dans la production d’analyses et sur le terrain des luttes électorales et revendicatives. Croire le syndicalisme unifié et fortifié que nous souhaitons pourrait naître d’une FSU affaiblie et demandant asile, la corde au cou, relèverait d’une dangereuse illusion. L’unification sera – aussi - un combat.

Il nous reste du temps, et les élections pros nous prouvent que les personnels nous gardent leur confiance. Mais le temps commence à presser.

Matthieu LEIRITZ 01/11/2011

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